Salon du Livre du Touquet

J’ai eu 33 ans ce week-end, c’était la troisième fois que je fêtais mon anniversaire en salon. D’abord on est allés au Mont-Saint-Michel, qui nous a tout montré, ses ruelles pavées, ses boutiques et ses touristes. Je me suis dit que les gens n’habitaient plus le monde mais le photographiaient, et puisque j’avais un appareil photo dans les mains, je me suis dit shut the fuck up. Après on a roulé jusqu’au Touquet, toujours autant d’animaux morts sur les autoroutes. Ça m’a fait pleurer parce que cette année la dépression saisonnière tabasse fort, je pleure si le chat bâille, s’il pleut ou au moment de me réveiller. À l’hôtel on a maté la télé, putain les pubs, on ne se sent jamais aussi dysfonctionnel qu’en regardant la télé, tous ces humains beaux et basiques et béats avec leur dentifrice, leur voiture et leur pompe à chaleur. Comment pourrions-nous être à la hauteur ? Donc je me démêlais les cheveux, j’avais de la télé sur chaque mèche, j’ai pensé que je n’avais rien à foutre ici, que j’étais cheloue, wait, paye ta prise de conscience, c’était juste "Creep" de Radiohead. Le lendemain je découvrais le salon, ses visiteurs qui passaint, qui souriaient ou non, raconter mes livres, discuter avec les autrices autour, évoquer nos chiffres et nos chagrins, les plantes contre l’anxiété, c’est fou, dès que les conversations s’enchaînent on arrive vite au sujet des familles compliquées et des médicaments, alors les plantes, Montreuil à venir, on se reposera ensuite, promis, attention t’as un lecteur, OK à tout à l’heure. Bref, ce salon m’a plu, c’était intense et ambivalent comme un salon, comme la météo et comme moi. Moi doit désormais s’habituer à répondre "33 ans" quand on lui demandera son âge, et surtout embrasser pleinement cette impression d’être une chanson de Radiohead au milieu d’un playlist pop.